Thérapeutiques complémentaires, la chasse aux sorcières est ouverte !

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Le site Doctolib, qui permet une prise de rendez-vous avec des professionnels de santé a fait l’objet d’une récente polémique. Hormis le fait du lynchage médiatique et au travers de réseaux sociaux mettant en lumière la difficulté des institutions à réguler la santé, ce fait pose deux problématiques. La population aspire à une prise en charge différente de sa santé et la nécessité d’évaluer les thérapeutiques complémentaires et les thérapeutes.

 

Une prise en charge différente de la santé.

S’il est indéniable que la médecine, et surtout dans ses capacités interventionnelles, a fait d’immenses progrès, elle ne répond pas aux soins du quotidien. Certaines thérapeutiques nécessairement agressives comme dans le cancer nécessitent des soins de support pour améliorer la qualité de vie et la prise en charge de ces patients.

Les thérapeutiques complémentaires interviennent dans ce champ de la médecine construisant ce que l’on appelle la médecine intégrative.

Les médecins, notamment spécialistes, excellent dans leur art de guérir. Les patients constatent néanmoins un recul de la relation humaine dans leur prise en charge. Nous relevons fréquemment le manque de réponse à leurs questions relatives à leur pathologie et à leurs traitements.

Dans le cadre de la médecine générale, la règle à ce jour est à la dé-prescription. Cela signifie que tout ce qui n’est pas vital doit guérir tout seul. Ce n’est pas totalement faux. Alors pourquoi restons-nous champions en consommation d’antibiotiques, de psychotropes et d’anti-inflammatoires ? Il manque un maillon de la chaîne qui est de prendre en charge de façon différente ces problèmes de santé publique. Interviennent alors les thérapeutiques complémentaires comme l’homéopathie, l’acupuncture, la sophrologie, l’hypnose ou tout simplement l’activité physique adaptée (APA). Il suffit de voir l’échec de la mise en place du projet « Prescrimouv » dans le Grand Est, destiné à promouvoir l’APA, du fait de défaut de prescriptions, pour rendre compte du peu de cas fait en dehors du tout médicaments.

La foison de thérapeutiques complémentaires en fait une jungle dans laquelle il est difficile de se retrouver.

 

L’évaluation des thérapeutiques complémentaires et des thérapeutes.

Plusieurs institutions comme l’Agence des médecines complémentaires (A-MCA), le Collège Universitaire de Médecines Intégratives et Complémentaires (CUMIC) ou le Groupe d’Evaluation des Thérapies Complémentaires Personnalisées et des Pratiques Innovantes (GETCOP), travaillent sur ce sujet. Toutes ces associations ont en commun de rassembler des experts, des universitaires et chercheurs spécialisés dans l’évaluation.

Le premier point met en évidence l’évaluation de ces pratiques. Il paraît aujourd’hui évident que les méthodes utilisées pour évaluer les médicaments ne sont pas valides. La prise en charge globale des patients met en jeu de nombreux facteur que les études statistiques ne peuvent prendre en charge. La méthodologie reste à créer. Elle passera probablement par des études qualitatives incluant l’amélioration clinique et de la qualité de vie.

Ensuite, le second point concerne l’enseignement qui est très disparate. Allant de 2 WE à 2 ou 3 ans de formation, le résultat n’est pas le même. Un minimum de connaissances médicales et en psychopathologie pour déterminer les limites d’action est indispensable. La justification d’une pratique encadrée pour forger l’expérience et une certification permettant de s’y retrouver est nécessaire.

D’une façon générale, les thérapeutes doivent pouvoir montrer patte blanche. Si une formation sérieuse, y compris universitaire, n’est pas un gage de compétence du praticien, elle a au moins le mérite de proposer un bagage cognitif complet. Concernant les thérapeutes non-médecins, le travail associé à un professionnel de santé, pourquoi pas sur prescription, semble une forme de garantie contre la perte de chance d’un mauvais diagnostic.

Enfin, ces avancées, nécessaires pour réguler la médecine intégrative, pourraient donner naissance à un « Doctolibre » où chacun pourrait choisir un thérapeute, en lien avec son médecin traitant, dans un monde ou liberté rimerait avec sécurité.

Par Antoine Demonceaux

Médecin généraliste, homéopathe et psychanalyste

Bonjour, je m'appelle Antoine Demonceaux. Je suis médecin généraliste, homéopathe et psychanalyste depuis plus de 35 ans. Je suis également le Président de l'association Centre Ressource Reims.