Lettre à l’attention du Dr. Patrick BOUET pour la qualification du médecin homéopathe

Docteur Gérald LARZILLIERE

Médecin Généraliste orientation Homéopathie retraité

 

Monsieur le Docteur Patrick BOUET

                     Président du CNOM

 

Mon Cher Confrère,

 

En ces temps troublés pour la cohésion confraternelle du corps médical, je pense qu’il est de mon devoir de prendre la plume pour vous tenir informé de certains éléments pouvant vous aider à prendre votre décision concernant la qualification de Médecin Homéopathe, d’autant, vous le verrez par la suite, que je suis en partie responsable de cette situation.

Mais le mieux, pour une meilleure compréhension de mes arguments, est que je commence par vous relater brièvement mon parcours professionnel.

Diplômé de la Faculté de Médecine de Lyon, j’ai soutenu en décembre 1975 une thèse de Médecine Légale (Malformations vasculaires cérébrales et Traumatisme) avec le Pr LECUIRE, neurochirurgien chef de Service à l’Hôpital Pierre Wertheimer (Lyon).

Dans la foulée je me suis inscrit au CDOM de l’Ain en vue d’une installation à Trévoux (01600) où j’avais effectué mon stage interné et où le Maire me proposait un poste de Médecin chef du service de Longs Séjours Médicalisés.

Ce poste n’étant pas encore disponible, j’ai créé le 8 mars 1976 un cabinet de Médecine Générale Libérale que j’ai par la suite tenu à mi-temps de 1977 à 1983 après obtention de mon poste de Médecin Chef à l’Hôpital Montpensier de Trévoux.

Pendant cette période, autant dans le cadre hospitalier je continuais à mettre en pratique ce que j’avais appris pendant mes études, autant je rencontrais des difficultés à comprendre toutes les attentes de mes patients dans le cadre de mon activité de Médecine Générale.

A cette époque, vous le savez, le choix de la Médecine Générale Libérale en milieu largement rural, était « sacerdotal » (de garde 24 heures sur 24, excepté le dimanche où il y avait un tour de garde local à 5 médecins), mais là n’était pas le problème.

En fait, très souvent, je ne savais que faire de ces innombrables signes cliniques « accessoires » que me relataient mes patients ! Sans compter ces patients qui disparaissaient quelque temps de mon Cabinet, en raison de mes échecs, notamment vis-à-vis des pathologies fonctionnelles, et qui revenaient me voir, tout sourire, en m’expliquant qu’ils allaient mieux après avoir consulté un Médecin Homéopathe (et en me montrant une ordonnance à laquelle je ne comprenais strictement rien !).

Je ne devais après tout pas être trop mauvais médecin généraliste puisque le 1er janvier 1979 je prenais un premier associé pour partager mon activité, ce qui m’a permis de suivre l’enseignement de l’Homéopathie Clinique dans le cadre du Centre d’Enseignement et de Documentation Homéopathique (CEDH). La richesse de l’approche clinique du patient m’a immédiatement séduit, et je trouvais enfin la possibilité d’interpréter médicalement tous les signes cliniques amenés par mes patients. Néanmoins, je n’en restais pas moins réservé par rapport à l’efficacité supposée de ces médicaments en dilutions infinitésimales, et je n’arrivais pas à passer à l’acte en patientèle.

Jusqu’au jour où, en 1982, appelé une énième fois à domicile, un samedi midi, pour prendre en charge une amygdalite érythémato-pultacée fortement fébrile chez un jeune patient qui présentait ce tableau au moins une fois par mois, ce qui habituellement lui valait 8 jours d’antibiothérapie (à l’époque probabiliste, il n’y avait pas de TDR) et d’éviction scolaire. C’est la mère de l’enfant elle-même qui, à la fin de l’examen clinique et de la rédaction de mon ordonnance, sachant que j’avais fait mes études d’homéopathie, me suggéra de rédiger aussi, pour son enfant, une ordonnance d’homéopathie en fonction de mes constatations cliniques du jour, ce que je fis à contre-cœur et en lui demandant de me rappeler le lundi matin, tellement je redoutais qu’elle n’administre pas ma première ordonnance avec l’antibiotique…

Le lundi matin, la mère m’appelle comme convenu, et elle m’annonce que son enfant est à l’école en raison de l’amélioration rapide de son état avec le traitement homéopathique exclusivement. Je connaissais bien cet enfant qui, sous traitement classique s’améliorait chaque fois péniblement au bout de 5 jours et restait durablement fatigué.

Devant ce fait clinique, je décidais alors de tester cette thérapeutique, d’abord sur moi-même, puis en fonction de mes observations, prudemment au début, sur mes patients, en premier lieu sur des situations cliniques aiguës, en alternative aux traitements classiques, puis en traitement de Terrain sur des pathologies chroniques et récidivantes.

Les résultats obtenus m’ont tellement stupéfié, qu’en 1983 je quittais mon poste hospitalier, nous prenions un deuxième associé au niveau du Cabinet Médical, et je me consacrais les 30 années suivantes à la médecine générale orientation homéopathie.

Je ne mis pas longtemps à découvrir les limites de cette thérapeutique, mais aussi les indications qui lui sont propres, notamment dans la prise en charge holistique du patient, et la prise en charge des pathologies récurrentes qui échappent aux thérapeutiques conventionnelles, comme l’herpès, les pathologies infectieuses respiratoires à répétition ou l’eczéma (cette liste n’est pas limitative).

Ma formation professionnelle à partir de ce moment a été double : FMC classique (Rencontres Médicales Beaujolaises, Jeudis de l’Europe, Journées d’urgence pédiatrique, Actualités Claude Bernard, entre autres) et, parallèlement, Société Rhodanienne d’Homéopathie (SRH), Centre d’enseignement homéopathique lyonnais (CEHL), Journées de l’Institut Boiron (JIB), là aussi entre autres.

Mais venons-en à ma responsabilité, en partie, dans la crise que traverse l’enseignement de l’Homéopathie. En 1989, j’ai créé à Lyon un groupe de pairs (Groupe Homéopathique de Vaise), tous médecins homéopathes, dans le cadre d’une association 1901, qui se réunissait mensuellement pour échanger des cas cliniques et à laquelle j’ai participé pendant 15 ans avant de prendre la présidence du CEHL les 10 années suivantes (2 réunions par an associant FMC classique et homéopathique).

Parallèlement, en approchant de la retraite, j’ai souhaité m’investir aussi dans la transmission du savoir que j’avais accumulé pendant 30 ans. J’ai intégré l’équipe enseignante du CEDH, ce qui m’a permis d’entreprendre, avec le Dr Antoine DEMONCEAUX de Reims, un projet personnel : l’enseignement universitaire de l’homéopathie clinique en Facultés de Médecine.

Pour cela, j’ai d’abord créé en 2013 avec le Doyen Christian BERTHOU, de la Faculté de médecine de Brest, un DU de Thérapeutique Homéopathique, puis en 2016, avec le Doyen Carole BURILLON de la Faculté de médecine Lyon sud, et le Doyen Jean Paul ESCHARD de la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Reims, j’ai créé le DIU de Thérapeutique Homéopathique en Faculté de Médecine, sur 2 ans, avec contrôles des connaissances sur le schéma des ECN (QRM, QRU, Cas cliniques progressifs), stages chez le Praticien Homéopathe (12 ½ journées) et rédaction d’un mémoire. La première session 2016 – 2018 nous a permis de diplômer une vingtaine d’étudiants avec des résultats très brillants (entre 12 et 18/20) et la session en cours a montré le même engouement des étudiants. Je suis par ailleurs l’auteur des supports pédagogiques universitaires que je révise régulièrement avec une équipe de Médecins Homéopathes Cliniques enseignants en France et à l’étranger (Dr Daniel BERTHIER, Dr François CHEFDEVILLE) en fonction des données actuelles de la science (si elles remettent en cause la Thérapeutique Homéopathique).

La science, vous le savez, n’est pas achevée, et c’est tant mieux car il n’y aurait plus d’espoir d’améliorer la condition humaine.

L’Homme a mis longtemps à comprendre certaines choses qu’il croyait dû à des forces surnaturelles. Il se trouve que l’explication de l’action des dilutions homéopathiques est en train d’être découverte (travaux du Pr Marc HENRY sur la mémoire de l’eau, et sur les hautes dilutions du Pr Luc MONTAGNIER, Prix Nobel de Médecine), que la thérapeutique homéopathique a soulagé et soigné des centaines de millions de patients dans le monde entier depuis plus de deux siècles, ce que j’ai pu vérifier par moi-même en patientèle (à la plus grande joie des délégués à l’assurance maladie quand ils m’amenaient mon profil !). J’arrive à comprendre la décision de la HAS puisque les milliers d’études concernant la thérapeutique homéopathique (confère PubMeb, 5822 articles pour « homeopathy ») ne rentrent pas dans le cadre de l’EBM et des études en double aveugle contre placébo ! De plus, à décharge pour eux, dans la commission chargée de donner un avis, ne figurait aucun homéopathe. Mais quand vous avez un bilan électrique à faire chez vous, vous demandez l’avis d’un plombier*, même qualifié ?

Restons sérieux. Le corps médical s’est toujours distingué par sa confraternité et son indépendance vis-à-vis de toute sorte de pression de la part du pouvoir en place.

Alors je vous pose la question : si pour certains de nos confrères (124), je suis un charlatan, à la lecture de cette lettre, le pensez-vous aussi ?

Bien confraternellement,

Dr Gérald LARZILLIERE

 

PS : si vous avez le temps, je vous adresse un lien vers une étude critique des publications homéopathiques (méta-analyses) depuis 1991

* https://ndnr.com/pain-medicine/greater-than-placebo-a-critical-review-of-homeopathy-research/?fbclid=IwAR1e6Bjnr9ncU02P1hjM04vMio4WKOPS30mao8E84AAY_OrcmVr_4NSZ_K0

Par SafeMed

Collectif de patients et professionnels de santé pour une médecine intégrative.