Homéopathie : supprimer son enseignement revient à favoriser des pratiques non sécurisées

En septembre dernier, on apprenait que la faculté de médecine de Lille supprimait ses cours sur l’homéopathie. D’autres y réfléchiraient également. Au-delà de son caractère, que penser de cette  décision qui, sous couvert de dénoncer une thérapie jugée non conventionnelle, préfère laisser émerger une pratique hors de tout encadrement public ?

L’homéopathie est arrivée en France au XIXème siècle avec le fondateur de la discipline, Samuel Hahnemann. Depuis, les professionnels ont structuré leurs enseignements et leurs savoirs. Pourtant, en septembre 2018, nous apprenions qu’à la suite de la faculté de médecine de Lille, d’autres facultés de médecine envisageraient d’arrêter les enseignements qu’elles dispensent… Comment interpréter cette position qui met en avant la volonté de ne pas cautionner une médecine jugée non conventionnelle ? Qui aura pour conséquence de la marginaliser et de faire émerger des pratiques hors de tout cadre officiel ?

Une décision incompréhensible

Pour le docteur Mourad Benabdallah, diplômé de la faculté de médecine de Lille, et jusqu’à ce jour le coordinateur de l’enseignement homéopathique, chargé de cours dans le Diplôme Universitaire d’Homéopathie, cette décision est incompréhensible : « l’homéopathie est inscrite dans la pharmacopée depuis les années 1970. Par ailleurs, les pharmaciens dans leur cycle d’études sont formés à l’étude du médicament homéopathique. »

Une décision aussi incompréhensible pour l’opinion. Selon une étude IPSOS[1], 94% des Français interrogés expriment le « besoin d’intégrer l’homéopathie dans la formation initiale des prescripteurs ». La thérapeutique des homéopathes est donc globalement appréciée par les malades : 90% des interrogés aimeraient pouvoir « disposer de plus de professionnels compétents » en homéopathie.

Question formation, l’homéopathe est d’abord un médecin

Officiellement, l’homéopathie doit être pratiquée par un docteur en médecine, généraliste ou spécialiste, au sens de l’article L356-2 du code de santé public. En effet, l’homéopathie est reconnue depuis 1997 par le conseil de l’Ordre des médecins qui adopte alors le rapport Lebatard-Sartre ou Rapport de la commission d’étude sur l’homéopathie. La Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) comptabilisait en 2014, 73 homéopathes exclusifs, et 1419 médecins ayant une pratique mixte de médecine générale et d’homéopathie. L’institut National Homéopathique Français (INHF) en revanche, considère que le nombre d’homéopathes diplômés s’élève à environ 5000, toutes pratiques confondues.

Arbitrage en février 2019

Alors que la communauté médicale est divisée sur le sujet, c’est la Haute Autorité de Santé qui devra trancher sur l’avenir des formations en février 2019.

En attendant, je partage l’opinion du  président de la conférence des doyens des facultés de médecine, Jean Sibilia, qui prévient que « si l’homéopathie n’est pas enseignée dans les universités, elle le sera par des officines moins académiques, voire des industriels »… Car même déremboursée, cette pratique continuera d’avoir ses adeptes. Le politique doit donc décider s’il veut continuer à sécuriser une pratique plébsicitée par les patients ou laisser émerger des pratiques hors cadres.

A suivre.


[1] L’homéopathie fait de plus en plus d’adeptes, enquête IPSOS

Par SafeMed

Collectif de patients et professionnels de santé pour une médecine intégrative.